Benoît Chassaing traque les « Invaders » dans le microbiote intestinal

Chargé de recherche à l’Inserm, Benoît Chassaing vient de monter son équipe dédiée à l’étude des interactions microbiote/mucus dans les maladies inflammatoires chroniques, à l’Institut Cochin (Paris). Un tremplin qu’il doit à l’obtention d’un financement du Conseil européen de la recherche, pour lui permettre d’explorer le monde des bactéries intestinales. Il s’intéresse en particulier à celles impliquées dans l’apparition de maladies inflammatoires et métaboliques.

Benoît Chassaing traque les milliards de bactéries présentes dans nos intestins. Son but ? Décrire leur identité, leur fonctionnement, leurs interactions avec le reste de l’organisme et leurs impacts sur la santé. Vaste tâche ! Il a entamé ce travail dès sa thèse, réalisée dans l’unité Microbes, intestin, inflammation et susceptibilité de l’hôte* à Clermont Ferrand, et obtenue en 2011. Avec sa directrice de thèse et professeure de biologie moléculaire Arlette Darfeuille-Michaud, il étudie alors certaines souches bactériennes impliquées dans l’inflammation intestinale. « J’y suis allé avec beaucoup d’enthousiasme car elle qui m’a contaminée par le virus de la recherche, plaisante-t-il. C’est elle qui m’a véritablement insufflé cette passion pour l’infiniment petit ». C’est ainsi que Benoît Chassaing commence à s’intéresser au microbiote intestinal, c’est-à-dire à l’ensemble des micro-organismes colonisant nos intestins. 

Des Invaders ? associés au développement de maladies inflammatoires chroniques et de dérégulations métaboliques

Souhaitant poursuivre dans cette voie, il se rend ensuite aux Etats-Unis, à l’Institut des sciences biomédicale de l’Université de Georgie (Atlanta), pour effectuer un stage postdoctoral dédié à l’étude du microbiote sous la direction d’Andrew Gewirtz. « Cette expérience très riche a vraiment élargi mon expertise dans ce domaine. Nous avons pu développer de nouveaux outils et de nouvelles techniques d’analyse pour étudier ce microbiote intestinal », explique-t-il. Ses travaux portent sur la régulation de ce dernier, et notamment sur les facteurs génétiques et environnementaux influençant sa composition. Il décide par la suite de rester quatre années supplémentaires en tant que professeur assistant, afin de développer sa recherche de manière indépendante. C’est durant cette période qu’il découvre que la couche de mucus qui recouvre la paroi intestinale, censée être stérile pour isoler le reste de l’organisme des bactéries intestinales, peut être colonisée par certaines bactéries qu’il décide de nommer Invaders. Et ce n’est pas tout : leur présence est associée au développement de maladies inflammatoires chroniques et de dérégulations métaboliques, non seulement chez l’animal mais aussi chez l’Homme !

Il décide alors de pousser plus loin ses investigations, souhaitant notamment identifier ces Invaders capables de pénétrer dans ce territoire interdit, comprendre comment ils y parviennent et dans quelles circonstances, afin de mettre au point de nouvelles approches thérapeutiques pour prévenir de la présence de ces bactéries néfastes. Il monte alors une demande de financement auprès du Conseil européen de la recherche et obtient un Starting Grant, soit 1,85 million d’euros sur cinq ans. Dans la foulée, il décroche un poste de chargé de recherche à l’Inserm et monte son équipe, Interactions microbiote/mucus dans les maladies inflammatoires chroniques, au sein du département Endocrinologie, métabolisme et diabètes** de l’Institut Cochin à Paris. « Le laboratoire, vient d’ouvrir ses portes, en octobre 2019 ! Nous sommes déjà quatre, avec deux post-doctorants et une assistante ingénieure. Des étudiants vont également nous rejoindre prochainement pour compléter l’équipe », se réjouit-il. Plus rien ne l’arrête désormais pour lever les secrets du microbiote et des Invaders ?.

Notes :
* unité 1071 Inserm/Université Clermont Auvergne, Clermont-Ferrand
** unité 1016 Inserm/CNRS/Université Paris Descartes, Paris