Hypersomnies et narcolepsie

Les syndromes d’hypersomnolence d’origine centrale

Les syndromes d’hypersomnolence d’origine centrale – narcolepsies type 1 et 2, syndrome de Kleine-Levin et hypersomnie idiopathique – correspondent à des besoins excessifs de sommeil. Il s’agit de maladies rares qui entraînent des perturbations majeures de la vie quotidienne et sont associées à des troubles psychosociaux et médicaux potentiellement graves. Les enjeux de la recherche sont d’identifier leurs mécanismes d’apparition et des marqueurs objectifs de ces maladies, afin de proposer des traitements spécifiques et plus efficaces.

Dossier mis à jour avec Yves Dauvilliers et Lucie Barateau, Centre de référence Narcolepsies et hypersomnies rares de Montpellier, Institut des neurosciences de Montpellier (unité 1298 Inserm/Université de Montpellier), et Isabelle Arnulf, Centre de référence Narcolepsie et hypersomnies rares de la Pitié-Salpêtrière à Paris, Institut du cerveau (unité 1127 Inserm/CNRS/Sorbonne Université).

Comprendre les hypersomnolences d’origine centrale

À l’heure où le manque de sommeil constitue un mal croissant dans les populations occidentales, l’excès de sommeil peut sembler anachronique et la somnolence un phénomène normal. Pourtant, les hypersomnolences d’origine centrale – des pathologies rares caractérisées par une durée prolongée de sommeil et/ou une somnolence diurne excessive – sont sévères et handicapantes.

Qu’est-ce que l’hypersomnolence ?

L’hypersomnolence peut associer plusieurs symptômes, de sévérité et de fréquence variables :

  • Une quantité excessive de sommeil pendant la nuit (au moins 9h de sommeil par nuit)
  • Une somnolence excessive pendant la journée (difficultés à rester éveillé ou alerte durant la période de veille)
  • Une inertie au réveil qui correspond à des difficultés pour atteindre un état d’éveil complet après une période de sommeil. Elle peut s’accompagner d’une confusion, d’une désorientation, voire de troubles de la coordination motrice.
  • Des endormissements irrépressibles au cours de la journée.

Chez la majorité d’entre nous, ces symptômes sont consécutifs à un déficit de sommeil important ou à un épuisement physique. Chez certaines personnes, ils sont liés à une maladie d’origine psychiatrique, neurologique (traumatisme, neurodégénérescence…), infectieuse (infection par le virus Epstein-Barr, syndrome de Guillain-Barré…), endocrinienne ou métabolique (hypothyroïdie, diabète, insuffisance rénale ou pancréatique…), ou encore à l’effet de certaines substances (arrêt brutal de stimulants, abus de médicaments de type hypnotiques ou sédatifs…). Dans tous ces cas, on parle d’hypersomnolence secondaire.

Mais pour une petite fraction de la population, ces symptômes ne font suite à aucun comportement ou maladie associées. L’hypersomnolence résulte de dysfonctionnements des systèmes de régulation des états de veille et de sommeil au niveau cérébral. Elle est alors qualifiée de « primaire » ou de « centrale ». Rares et méconnues, ces formes d’hypersomnolence sont souvent associées à un retard diagnostique de plusieurs années.

Or, l’hypersomnolence est à l’origine d’une altération de la qualité de vie, avec un retentissement scolaire ou professionnel important. Elle est en outre associée à un sur-risque d’accidents de la voie publique.

Quatre types d’hypersomnolence d’origine centrale

La narcolepsie de type 1 

La narcolepsie de type 1 est une maladie chronique rare qui concerne environ une personne sur 5 000, soit 0,02 % de la population générale. Elle survient le plus souvent à l’adolescence ou chez les jeunes adultes, avec des pics d’incidence à 15 ans et à 35 ans. Un tiers des patients concernés présente une obésité. Une prédisposition génétique, liée à un allèle HLA spécifique (HLA DQB1*06 :02), a été mise en évidence.

Cette hypersomnolence centrale est caractérisé par un sommeil nocturne de durée normale mais de qualité médiocre, avec de multiples éveils en cours de nuit, une somnolence diurne excessive et des endormissements irrépressibles qui peuvent survenir à tout moment de la journée, même en pleine activité. Au moment de l’endormissement ou du réveil, les patients peuvent souffrir d’hallucinations et d’une paralysie transitoire, d’une durée de quelques secondes à quelques minutes.

Ces personnes sont en outre très souvent sujettes à des épisodes de cataplexie, c’est-à-dire des chutes brutales du tonus musculaire. L’atonie musculaire peut être généralisée ou partielle, concernant par exemple seulement la partie inférieure du visage, les bras, ou les genoux. Elle survient généralement à la suite d’une émotion agréable telle que le rire ou la surprise. Une cataplexie dure rarement plus de trente secondes. Elle peut être associée à un risque d’accidents, de chutes et de blessures.

Au-delà des répercussions négatives évidentes de cette maladie sur la vie quotidienne, les personnes atteintes de narcolepsie de type 1 présentent des difficultés de concentration et d’apprentissage. La somnolence diurne et les cataplexies tendent à s’améliorer avec l’âge, alors que les perturbations du sommeil de nuit tendent à s’aggraver.

Un déficit en orexine

La narcolepsie de type 1 est provoquée par un déficit en orexine (également appelée hypocrétine), un neurotransmetteur « éveillant ». Ce déficit est lui-même causé par la destruction sélective des neurones qui sécrètent l’orexine, très probablement via un mécanisme auto-immun. Chez les patients narcoleptiques, plus de 95 % des neurones à orexine ont disparu.

Situés dans l’hypothalamus latéral, ces neurones ont des projections dans plusieurs régions du système nerveux central, dont le système d’éveil. L’hypersomnolence dont souffrent les patients correspondrait ainsi à un dysfonctionnement du système d’éveil consécutif à la destruction des neurones à orexine, avec des endormissements se faisant directement en sommeil paradoxal. La cataplexie pourrait quant à elle correspondre à une exacerbation d’une faiblesse musculaire en cas de fou-rire, toujours en lien avec le déficit d’orexine qui provoquerait une perte de contrôle musculaire.

La narcolepsie de type 2 

La narcolepsie de type 2 entraîne les mêmes symptômes que la narcolepsie de type 1, mais sans cataplexie. Les mécanismes à l’origine des deux syndromes sont néanmoins différents, puisque les taux d’orexine mesurés dans le liquide céphalo-rachidien des patients atteints de narcolepsie de type 2 ne sont pas diminués. La physiopathologie de cette seconde forme d’hypersomnolence semble hétérogène et aucune prédisposition génétique à la maladie n’a encore pu être identifiée. Certains cas pourraient être liés à une carence partielle en orexine, non mesurable dans le liquide céphalorachidien, mais ce n’est pas certain. L’évolution de la maladie est variable : elle peut s’aggraver, rester stable ou s’améliorer avec les années.

Le syndrome de Kleine-Levin

Cette hypersomnolence centrale extrêmement rare (1 à 2 cas pour un million d’individus) se déclare le plus souvent à l’adolescence, chez des garçons dans deux tiers des cas. Elle se manifeste par des épisodes récurrents d’hypersomnie qui durent en moyenne 10 jours, associés à des troubles neuropsychiatriques. Ces épisodes peuvent être déclenchés par des facteurs tels que la privation de sommeil, la prise d’alcool, une infection virale ou encore un traumatisme crânien.

Pendant ces épisodes, les patients dorment 15 à 21 heures par jour et sont apathiques, confus et ralentis, avec souvent une sensation de « déréalisation » qui leur donne l’impression d’être dans un rêve. Des troubles du comportement peuvent être associés (notamment alimentaires et/ou sexuels avec désinhibition). Ces crises sont espacées de plusieurs semaines au cours desquelles la vie reprend son cours normal, hormis quelques troubles de la mémorisation. La maladie évolue sur plusieurs années, puis les épisodes d’hypersomnie s’espacent et finissent le plus souvent par disparaître. 

Les mécanismes de cette maladie (physiopathologie) restent inconnus, mais certains travaux ont suggéré qu’elle pourrait être liée à des dysfonctions immunitaires et inflammatoires.

L’hypersomnie idiopathique

L’hypersomnie idiopathique est associée à une hypovigilance continue. C’est sa différence essentielle avec la narcolepsie : les accès de sommeil sont beaucoup plus longs, de nuit comme de jour. Par ailleurs, si ce syndrome débute lui aussi principalement à l’adolescence ou chez les jeunes adultes, avec une prévalence proche de celle de la narcolepsie de type 1, il a une nette prédominance féminine. Sa physiopathologie n’est pas élucidée à ce jour.

Il est caractérisé par une somnolence diurne excessive parfois constante, entrecoupée de siestes peu reposantes. Le sommeil nocturne est souvent très allongé et non reposant, sans qu’il présente pour autant des anomalies du rythme circadien. Le réveil est très difficile, avec une inertie et le sentiment d’être dans le brouillard pendant parfois plusieurs heures. Au cours du temps, les symptômes peuvent rester stables ou évoluer. Chez certains patients, ils peuvent s’améliorer voire disparaître avec le temps.

NarcolepsieSyndrome de Kleine-LevinHypersomnie idiopathique
• Endormissements irrépressibles pendant la journée

• Cataplexies (chutes du tonus musculaire), uniquement dans la narcolepsie de type 1

• Sommeil nocturne de durée normal mais de qualité médiocre

• Hallucinations et paralysies à la transition veille/sommeil
• Épisodes récurrents d’hypersomnie (15 à 21 heures par jour) pendant plusieurs jours ou plusieurs semaines

• Troubles cognitifs et comportementaux
• Somnolence et hypovigilance continues pendant la journée

• Sommeil nocturne de durée très souvent allongée

• Forte inertie au réveil, le matin et après les siestes
Principales manifestations des différentes formes d’hypersomnie d’origine centrale

Les tests diagnostiques : une palette d’examens

En France, le diagnostic et la prise en charge des syndromes d’hypersomnolence bénéficient d’une organisation particulière du système de soins. Celle-ci s’appuie sur des centres de référence et de compétences répartis sur le territoire français. Des protocoles nationaux de diagnostic et de soins (PNDS) ont été validés par la Haute autorité de santé (HAS) en 2021 pour les narcolepsies et pour le syndrome de Kleine-Levin.

Face à une somnolence excessive, la démarche diagnostique doit permettre d’objectiver les plaintes et de déterminer l’origine primaire ou secondaire de la maladie.

Des auto-questionnaires peuvent être utilisés pour évaluer la plainte d’hypersomnolence, en particulier l’échelle de somnolence d’Epworth (ESS), l’échelle de sévérité de la narcolepsie (NSS) et l’échelle de sévérité de l’hypersomnie idiopathique (IHSS). Un agenda du sommeil permet aussi au patient de rapporter la durée et la qualité de ses périodes de sommeil et d’éveil durant 2 semaines. Il peut être complété par l’actimétrie, grâce à un bracelet porté durant deux semaines afin d’évaluer les phases de repos et d’activité dans la vie quotidienne.

Une polysomnographie (PSG) nocturne analyse la quantité du sommeil nocturne via un électroencéphalogramme (mesure de l’activité cérébrale), un électro-oculogramme (mesure des mouvements des yeux) et un électromyogramme (mesure de l’activité musculaire), associée à une évaluation de la fonction respiratoire et cardiaque. Cet examen permet d’éliminer d’autres causes d’hypersomnolence, comme les apnées du sommeil. Des protocoles réalisés dans des centres spécialisés offrent la possibilité de dormir « à volonté » au lit, en condition standardisée, pour objectiver l’allongement du temps de sommeil de nuit et de jour. Dépasser 11h de sommeil sur 24h est défini comme pathologique. Et dans le cadre de protocoles spécifiques plus longs, une durée de sommeil supérieure à 19h sur 32h d’enregistrement continu en condition d’alitement prolongé permet de diagnostiquer plus spécifiquement l’hypersomnie idiopathique.

Un test itératif de latence d’endormissement (TILE) permet d’évaluer la capacité d’un patient à s’endormir de façon répétée au cours de la journée dans des conditions propices à l’endormissement. À cinq reprises espacées de 2 heures au cours de la journée, le patient est allongé pendant 20 minutes dans l’obscurité et dans le calme, avec la consigne d’essayer de dormir. Un électroencéphalogramme est réalisé durant les tests afin de déterminer l’état d’éveil ou de sommeil du patient et, le cas échéant, d’évaluer les stades de sommeil. Le délai d’endormissement est considéré comme normal au-dessus de 10 minutes, mais pathologique s’il est inférieur à 8 minutes.

Un test de maintien d’éveil (TME) évalue quant à lui la capacité à rester éveiller en journée dans des conditions favorables à l’endormissement. Durant l’examen, le patient est assis 40 minutes dans une pièce avec une lumière tamisée : il doit essayer de ne pas s’endormir. Le test est réalisé à quatre reprises, avec deux heures d’intervalle entre chaque examen. Un électroencéphalogramme déterminera l’état de vigilance du patient. S’il s’endort, l’enregistrement de son activité cérébrale permettra de déterminer le délai d’endormissement. Ce dernier est considéré comme non pathologique s’il est supérieur à 19 minutes.

Enfin, des analyses complémentaires – imagerie cérébrale, biologie – peuvent être parfois nécessaires pour confirmer la nature de l’hypersomnolence, notamment pour mieux identifier la nature d’une hypersomnie secondaire. 

Les critères diagnostiques

Les critères diagnostics de la narcolepsie de type 1 reposent sur plusieurs observations : dans la moitié des cas le sommeil paradoxal survient dans les 15 minutes après l’endormissement nocturne, la latence d’endormissement diurne (test TILE) est courte, inférieure à 8 minutes, avec au moins deux endormissements diurnes en sommeil paradoxal. Enfin, le taux d’orexine/hypocrétine dans le liquide céphalo-rachidien est nettement abaissé.

Le diagnostic d’hypersomnie idiopathique repose sur une polysomnographie qui montre un sommeil de nuit non fragmenté ainsi qu’un TILE qui confirme la somnolence diurne avec une durée moyenne d’endormissement de moins de 8 minutes et pas plus d’un seul endormissement en sommeil paradoxal. Le diagnostic peut également être posé grâce à un enregistrement du sommeil nocturne de longue durée qui objective l’allongement du temps de sommeil sur 24h (plus de 11h), ou sur 32h d’enregistrement consécutif (1 nuit, 1 jour et 1 nuit, avec une durée de sommeil supérieure à 19h).

Aucun examen ne permet de diagnostiquer formellement le syndrome de Kleine-Levin. Un enregistrement du sommeil (polysomnographie) sur 24h peut permettre d’objectiver l’allongement du temps de sommeil, mais l’IRM cérébrale et l’électroencéphalogramme ne montrent pas d’anomalie spécifique. Chez deux tiers des patients, les images obtenues par TEP scan sont cependant anormales, même en dehors des crises.

Des traitements symptomatiques ou plus spécifiques

Idéalement, la prise en charge des patients hypersomnolents doit avoir lieu dans les centres de référence et de compétence maladie rares Narcolepsies Hypersomnies.

L’éducation thérapeutique est toujours nécessaire pour apprendre au patient à comprendre sa maladie, mieux la gérer et adopter une hygiène de vie qui limitent les risques (éviter la consommation d’alcool, pratiquer une activité physique, veiller à son alimentation…). Une bonne hygiène de sommeil et la programmation de siestes à des horaires définis (notamment en cas de narcolepsie) sont également indispensables pour que le patient résiste mieux à la somnolence diurne.

Dans la narcolepsie, la somnolence diurne excessive et les accès irrépressibles de sommeil sont traités par des molécules éveillantes qui ciblent des voies neuronales spécifiques. Le modafinil et le pitolisant sont les mieux tolérées. Le solriamfétol est aussi très efficace mais un peu moins bien toléré. Le méthylphénidate ou plus rarement les amphétamines peuvent également être prescrits en deuxième intention en cas d’effets indésirables ou d’un manque d’efficacité des médicaments de première intention. L’oxybate de sodium (qui stimule des récepteurs neuronaux GABA-B) réduit la somnolence diurne excessive, la fragmentation du sommeil nocturne, ainsi que la cataplexie. Contre la cataplexie, d’autres médicaments peuvent aussi être prescrits mais n’ont pas officiellement cette indication (prescription hors AMM) : des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et la noradrénaline, des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine ou, plus rarement, des antidépresseurs tricycliques. De nouveaux traitements plus spécifiques, ciblant la voie de l’orexine, sont par ailleurs en cours de développement (voir plus loin).

Aucun médicament avec une indication spécifique dans l’hypersomnie idiopathique n’est actuellement disponible. Les cliniciens utilisent souvent ceux proposés dans la cadre de la narcolepsie. 

Enfin, si les médicaments « éveillants » sont inefficaces pour traiter le syndrome de Kleine-Levin, des traitements symptomatiques peuvent soulager l’anxiété, les idées délirantes ou la déréalisation. Lorsque les épisodes sont fréquents, avec un handicap fonctionnel important, un traitement préventif à base de lithium ou valproate peut être mis en place dans un centre de référence.

Les enjeux de la recherche

Les hypersomnolences centrales sont des maladies rares et beaucoup d’énigmes relatives à leurs origines et leurs mécanismes restent à résoudre. Or seule la compréhension de ces mécanismes permettra in fine de développer des traitements plus spécifiques. Cet enjeu est compliqué par les modèles d’étude disponibles : des animaux atteints de troubles semblables à ceux des humains ont permis des avancées significatives dans le domaine de la narcolepsie, mais ils n’existent pas encore de bon modèle pour explorer les mécanismes l’hypersomnie idiopathique et du syndrome de Kleine-Levin. 

Vers un traitement spécifique de la narcolepsie de type 1

Dans la narcolepsie de type 1, de grands espoirs reposent actuellement sur le développement d’agonistes des récepteurs‑2 de l’orexine. Un premier essai coordonné par le centre de référence des narcolepsies et hypersomnies rares de Montpellier (CHU de Montpellier, Institut des neurosciences de Montpellier, Inserm/Université de Montpellier) montre une amélioration majeure des symptômes ressentis par les patients (somnolence et cataplexies). Le développement a toutefois été interrompu en raison d’une toxicité hépatique associée au traitement, mais d’autres agonistes des récepteurs‑2 de l’orexine sont actuellement à l’essai avec des résultats très encourageants.

Une origine auto-immune ?

Si l’origine de la perte des neurones à orexine dans la narcolepsie de type 1 reste incertaine, la mise en jeu un processus auto-immun qui détruirait ces cellules nerveuses est suspectée. Il repose sur une très forte prédisposition génétique à la maladie, avec un variant du gène HLA (HLA DQB1*06:02) impliqué dans la reconnaissance des cellules du soi, retrouvé chez plus de 97 % des patients alors qu’il n’est présent que chez 20 à 25% des individus en population générale. Les mécanismes, complexes, impliqueraient des lymphocytes T CD4+ spécifiques en périphérie et des lymphocytes T CD8+ au niveau central. Certains facteurs environnementaux immunogènes seraient susceptibles de déclencher cette réponse immunitaire inappropriée, comme une infection grippale ou encore certains vaccins (vaccin Pandemrix contre la grippe A H1N1).

Mieux comprendre le syndrome de Kleine-Levin 

D’importantes avancées ont été réalisées au cours des dernières années dans la compréhension du syndrome de Kleine-Levin. Quatre pour cent de cas sont familiaux, suggérant l’existence d’un facteur héréditaire prédisposant. Par ailleurs, des problèmes périnataux ou développementaux semblent également favoriser la survenue de la maladie. 

Face à la rareté des cas, les équipes spécialisées du monde entier collaborent afin de constituer des biobanques d’ADN, de sérum ou de liquide céphalo-rachidien. Leur enrichissement permet progressivement d’avancer sur les fronts des connaissances fondamentales et cliniques. Ainsi, une première piste de prédisposition génétique a été identifiée : il s’agit d’un variant du gène TRANK1. Déjà impliqué dans les troubles bipolaires, ce gène ne serait cependant pas un facteur suffisant pour déclencher la maladie : les personnes qui en sont porteuses n’auraient que de 20 % de risque supplémentaire de développer maladie par rapport à celles qui ne le portent pas. 

Sur le plan physiopathologique, l’hypothèse d’une maladie d’origine psychiatrique est aujourd’hui écartée et aucun mécanisme lié à des neurotransmetteurs n’a été identifié. En revanche, les études d’imagerie fonctionnelle ont mis en évidence une hypoactivité de régions du cerveau qui pourrait expliquer les manifestations de déréalisation et de désinhibition.

Les chercheurs du centre national de référence sur les hypersomnies tentent en outre d’identifier des mécanismes immunitaires et inflammatoires associés à la maladie, dont l’existence est notamment suggérée par le fait que le syndrome apparaît généralement après un épisode infectieux. L’autre hypothèse actuellement explorée par les spécialistes français est celle de la perméabilité de la barrière hémato-encéphalique (BHE) à des anticorps qui favoriseraient les crises. En pratique, la récurrence des épisodes fait effectivement suite à des comportements qui réduisent la fonction barrière de la BHE : consommation d’alcool, manque de sommeil, traumatisme crânien, épisode infectieux… La recherche du ou des anticorps qui franchiraient cette BHE fait l’objet de recherches spécifiques. 

Encore beaucoup d’inconnues sur l’hypersomnie idiopathique 

L’hypersomnie idiopathique est sans doute le moins étudié des syndromes d’hypersomnolence. Aucun biomarqueur robuste de cette maladie n’a été découvert à ce jour. Dès lors, elle reste sous-diagnostiquée et il est difficile d’apporter des explications claires sur son origine. Pour l’heure, le rôle des neurones à orexine, à histamine, à noradrénaline ou à sérotonine est exclu. Et l’hypothèse d’une sécrétion inappropriée d’une substance endogène qui viendrait perturber le système gabaergique n’a pas été confirmée.

L’existence de 15 % de cas familiaux suggèrent là encore une prédisposition familiale et de récentes études ont permis l’identification de quelques gènes candidats dont il reste à confirmer l’implication.

Pour aller plus loin

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