La mort aux trousses du schistosome

Une menace plane sur le schistosome : une équipe Inserm vient de trouver une façon de s’attaquer à la fois à la survie et à la reproduction de ce ver responsable de bilharziose, l’affection parasitaire la plus fréquente après le paludisme.

Attaquer à la fois au métabolisme et à la reproduction du schistosome : cette stratégie presque sadique est celle développée par une équipe de chercheurs lillois pour lutter contre ce ver redoutable ! Les chercheurs ont en effet découvert une molécule capable d’inhiber quatre récepteurs à la fois, impliqués dans ces différentes fonctions. 

Maladie sévère socialement et économiquement

Le schistosome est responsable de bilharziose, la deuxième maladie parasitaire la plus fréquente dans les régions tropicales et subtropicales, après le paludisme. Le ver pénètre dans les tissus humains et y pond des œufs à foison. Les inflammations et les lésions ainsi provoquées peuvent s’accompagner d’une litanie de complications : fatigue chronique, augmentation du volume de la rate (splénomégalie), hypertension portale, cancers de la vessie, problèmes hépatiques… De plus, le parasite s’attaque aussi au bétail. Aussi, au préjudice social engendré par la maladie dans les régions où ce ver sévit, s’ajoute un préjudice économique. 

Un traitement est actuellement disponible : le praziquantel. Mais son utilisation massive génère des résistances et une baisse d’efficacité dans certains cas. En outre, il n’élimine pas totalement le parasite car il n’est actif que sur les formes adultes du ver. Il est donc nécessaire de renouveler le traitement tous les six mois. 

Une molécule pour quatre cibles

Pour parvenir à lutter contre le schistosome de façon plus radicale, une équipe Inserm* s’est penchée sur les mécanismes moléculaires du développement du parasite. Les chercheurs ont découvert deux récepteurs(Venus kinases) impliqués dans des fonctions de reproduction du ver. Or ces récepteurs présentent des similitudes de structure avec deux récepteurs à l’insuline. Il semble donc possible de bloquer ces quatre récepteurs avec une seule et même molécule. Une telle molécule altérerait tout à la fois la capacité du ver à se reproduire, mais également son métabolisme glucidique : une double menace pour sa survie ! 

Les chercheurs ont testé plusieurs subtances capables de reconnaître les structures communes aux quatre récepteurs. Ils en ont identifié une, la tyrphostine AG1024, capable de bloquer la production des œufs et d’entrainer la mort des vers, in vitro. 

Hélas, « la molécule AG1024 reconnaît à la fois les récepteurs à l’insuline du ver et ceux de l’hôte humain. Son utilisation telle quelle est donc écartée. Mais nous avons validé l’intérêt de cibler en même temps ces deux types de récepteurs, Venus kinases et récepteurs à l’insuline », explique Colette Dissous, co-auteur des travaux. « Nous allons maintenant rechercher une molécule plus spécifique des récepteurs à l’insuline du ver, qui soit également spécifique des récepteurs Venus kinases. Ces derniers n’existent pas chez l’homme », précise la chercheuse. 


Note :
*Unité 1019 Inserm/Université de Lille 1/Institut Pasteur de Lille/CNRS

Source :
M. Vanderstraete et coll. Dual targeting of insulin and Venus kinase receptors of Schistosoma mansoni for novel anti-schistosome therapy, PLoS Negl Trop Dis, 16 mai 2013, vol 7(5):e2226

Informations complémentaires

Pour en savoir plus sur le schistosome et la bilharziose, regardez cet épisode de la série d’animation en 3D A bord du Nanotilus