Enraciner la responsabilité sociétale

En cohérence avec sa mission en faveur de la santé humaine, l’Inserm s’engage pour contribuer de manière globale à une société en bonne santé, en cultivant notamment sa responsabilité écologique et sociétale. Impact environnemental, égalité professionnelle, lutte contre les discriminations sont autant de questions que l’Institut prend à bras-le-corps.

Un article à retrouver dans le rapport d’activité 2023 de l’Inserm

Une année marquée du sceau de la transition écologique et sociétale vient de s’écouler à l’Inserm, alors que l’Institut avait rendu public son Plan de sobriété énergétique et d’exemplarité en novembre 2022. Les seize mesures du plan, portant sur la mobilité, les achats responsables, la restauration durable, l’économie circulaire, le numérique, ou encore la consommation énergétique des installations, font l’objet d’un suivi rapproché.

Pour l’Inserm, les bâtiments sont une des composantes clés de cette transition, en raison notamment de leur utilisation intensive d’énergie pour le chauffage, la climatisation et l’éclairage. Grâce aux subventions du plan France Relance, l’Institut a engagé quatorze projets de rénovation énergétique des bâtiments, dont celle de la délégation régionale de Marseille, achevée en 2023 : toiture et façades dotées d’une isolation extérieure renforcée, ancienne chaufferie au fioul remplacée par des pompes à chaleur pour climatiser et chauffer les locaux selon les besoins réels, brise-soleil limitant les apports de chaleur en été, ventilation en double flux pour réduire les pertes énergétiques… De quoi réduire la consommation énergétique d’environ 40 % et les émissions de gaz à effet de serre de plus de 70 %. De même, l’Inserm a lancé des projets de décarbonation : la chaufferie au gaz du Centre de biochimie structurale de Montpellier sera remplacée par une pompe à chaleur, et deux bâtiments marseillais seront raccordés au réseau de chaleur du campus de Luminy. En 2023, des audits bilan carbone et gaz à effet de serre ont également été menés sur l’ensemble des bâtiments.

Comprendre les enjeux pour agir

Dans cette optique de transition, l’Inserm encourage officiellement l’ensemble des laboratoires à réaliser leur bilan d’émission de gaz à effet de serre avec l’outil GES 1.5 du collectif de chercheuses et de chercheurs Labos 1.5. De plus, au-delà des aspects carbone, l’Institut s’est engagé plus largement dans une démarche de responsabilité écologique et sociétale, embarquant quinze sites pilotes, qui portera ses premiers résultats en 2024.

Mais comment mettre en œuvre la transition ? Une des pierres angulaires de ce processus est l’encapacitation. « Nous souhaitons mettre les personnels de l’Inserm “en capacité” de comprendre les enjeux et le contexte de la transition écologique et sociétale et leur donner les moyens d’agir grâce à ces connaissances », explique Matthieu Thépin, chargé de mission Transition écologique et sociétale, recruté en mai 2023. Ainsi, l’Inserm propose à tous les agents deux ateliers de sensibilisation aux problématiques climatiques et à la transition bas carbone. La Fresque du climat, construite sur les données du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), vise à relier les causes et les effets du changement climatique pour comprendre ses enjeux globaux. Plus de 250 personnes, dont le comité de direction, y ont participé. Son pendant pratique, l’Atelier 2tonnes, lancé à l’automne 2023, a déjà permis à une cinquantaine d’agents de mesurer leur propre empreinte carbone et d’identifier des actions individuelles et collectives vers une transition bas carbone.

L’Inserm s’appuie également désormais sur un réseau dédié. « L’ambition est d’avoir des référents dans l’ensemble des laboratoires, des services supports et des délégations régionales, détaille Matthieu Thépin. Sur plus de 350 unités, une centaine a répondu à l’appel lancé en juillet 2023 et réfléchit, lors de réunions trimestrielles, sur différentes thématiques. Avec l’aide des référentes et référents régionaux, relais de la démarche au sein des délégations, nous souhaitons aussi pouvoir créer des dynamiques et des initiatives locales répondant à des enjeux locaux. » En parallèle, deux groupes de travail, Mobilités et Achats responsables, ont été lancés. Fruit de ces réflexions, la politique sur les achats responsables est entrée en vigueur en janvier 2024. Le groupe dédié à la mobilité prépare quant à lui un plan visant à décarboner la mobilité de l’Institut dans son ensemble.

Prendre soin de ses richesses humaines

Autre aspect de la transition : l’amélioration continue des pratiques en ressources humaines, reconnue par le label HR Excellence in Research (HRS4R), renouvelé pour la deuxième fois en 2023. Ce label comporte, entre autres, un focus important sur l’égalité femmes-hommes. Le premier plan triennal de l’Inserm en la matière vient justement de se conclure et un nouveau vient d’être approuvé par le conseil d’administration. En ligne de mire, l’égalité des chances pour accéder aux responsabilités. « Nous ne pouvons pas imposer des quotas mais préconisons très fortement aux commissions en charge de la promotion des chercheurs et chercheuses de promouvoir le même pourcentage de femmes que celui présent dans le vivier, explique Laëtitia Le Balc’h, référente Parité égalité professionnelle. Il nous faut sensibiliser aux stéréotypes de genre et revoir jusqu’aux critères de sélection des candidats, qui restent imprégnés d’une vision déformée de l’excellence scientifique, prétendument plus accessible aux hommes qu’aux femmes, et sur la parentalité. »

Particulièrement active sur ces questions, la délégation régionale de l’Inserm Occitanie Pyrénées a réalisé en 2023 une exposition virtuelle sur l’égalité entre femmes et hommes au travail, intitulée « Le sens de l’Histoire ». « Nous nous sommes aussi intéressés à la parentalité, centrale dans toutes ces questions, explique Cécile Fréry, coordinatrice du réseau Parité égalité professionnelle dans la délégation. Nous avons créé et diffusons un guide sur la parentalité, désormais repris au niveau national, qui condense toutes les informations sur les dispositifs autour de la grossesse, en termes de démarches, de réglementations, mais aussi sur l’arrivée de l’enfant, le retour au travail à l’Inserm… »

Alors qu’un dispositif national de lutte contre les discriminations, harcèlements, violences sexistes et sexuelles permet désormais de recueillir les signalements confidentiels et d’accompagner les personnes qui en font la demande, la délégation a également créé un baromètre de sensibilisation aux violences sexistes et sexuelles, inspiré du violentomètre distribué dans les collèges et lycées et adapté au contexte de l’Inserm. Un autre dispositif de signalement national comprenant une cellule d’écoute externe est déployé dans les délégations, dont Occitanie Pyrénées, en partenariat avec le Centre d’information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF). « C’est essentiel d’avoir des relais en local, car le contexte n’est pas le même d’une région à l’autre, analyse Cécile Fréry. Le public est différent, les thématiques des unités aussi, ce qui modifie l’écho reçu sur ces questions ; certaines structures sont plus ou moins féminisées… Ces réalités de terrain sont intéressantes à faire remonter au national car elles donnent des “colorations” complémentaires au plan égalité. »

Des rémunérations et des conditions de travail attractives

Autre focus du label HRS4R : l’égalité salariale et les revalorisations. La révision des salaires des contractuels a été engagée en 2023. « Nous étions en retard, concède Sylvain Bourgoin, directeur des Ressources humaines de l’Inserm jusqu’au printemps 2024. Les contrats étant adossés au financement de la recherche, nous les revalorisons lors de leur renouvellement : 80 % des salaires ont ainsi été revus cette année, 20 % le seront l’an prochain. » Les primes ont elles aussi été repensées : « Nous avons créé des grilles, car le traitement indemnitaire des agents était jusque-là fixé de manière très empirique. En travaillant sur la parité, nous avons en effet constaté que nous distribuions parfois des montants différents pour une même fonction, chez les chercheurs comme les ingénieurs. Progressivement, avec ces grilles par métier, nous octroyons aux chercheurs un montant de prime fixe et incluons les ingénieurs dans une fourchette “mini-maxi”. » Le régime indemnitaire des ingénieurs, techniciens et administratifs sera quant à lui revalorisé à partir d’avril 2024. Enfin, celui des personnels enseignants et chercheurs a été réformé en 2022. Depuis, l’Institut a pu doubler les primes de ses chercheurs de 7 millions d’euros en 2021 à 14 millions d’euros désormais.

En 2023, une attention particulière a aussi été portée aux jeunes chercheurs, avec un sondage pour savoir si leurs dix premières années de carrière répondaient aux attentes lors du recrutement. L’analyse, en cours, livre déjà quelques pistes. « Leur fidélisation ne repose pas seulement sur la satisfaction des attentes à l’embauche et le salaire, mais aussi sur les conditions de travail, les perspectives de carrière, le management, la conciliation entre vie professionnelle et personnelle, la prévention des risques psychosociaux… », analyse Sylvain Bourgoin.

Accompagner les situations de handicap

Le 16 novembre 2023 a également été signée une convention avec le Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, avec un volet sur l’accessibilité numérique. « L’accès aux outils digitaux constitue un axe fort de notre nouveau plan Handicap, explique Christelle Riche, chargée de mission Handicap et insertion professionnelle. Cela vise tous nos contenus et services numériques, qui doivent obéir au Référentiel général d’amélioration de l’accessibilité (RGAA). » Le chantier, colossal, concerne 250 sites et prendra du temps : nous prévoyons d’auditer quatre sites par an au début, puis la cadence s’accélérera. Le schéma pluriannuel d’accessibilité numérique, en cours de rédaction, devrait clarifier les étapes et actions à déployer dans les prochaines années, tout comme les financements nécessaires pour les mettre en œuvre. Le site inserm.fr respecte déjà 62,5 % des critères RGAA, avec un taux moyen de conformité du service en ligne de 92,79 %. Le prochain audit portera sur pro.inserm.fr. Afin de développer un sentiment d’appartenance à une organisation inclusive où les agents se sentent en confiance, l’Inserm a aussi organisé des actions de sensibilisation, notamment du théâtre d’entreprise sur le handicap psychique en octobre et des webinaires sur l’accessibilité numérique ou le handicap invisible en novembre. « Certains agents éprouvent des réticences à communiquer sur leur situation de handicap, explique Christelle Riche. Or la connaissance de leur singularité permet de mobiliser des aides spécifiques et de les accompagner dans leurs démarches ou l’adaptation de leur emploi. » Chaque agent peut désormais faire un autotest anonyme et confidentiel, sur des troubles pas forcément associés à un handicap au premier abord (diabète, asthme, lombalgie chronique, perte d’audition, troubles dys, séquelles d’un cancer, endométriose…), pour savoir s’il est éligible à la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé. « Nous voulions tester cet outil sur trois mois, mais vu le nombre de connexions, nous l’avons pérennisé : il est désormais disponible de façon illimitée pour tous les agents. »

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