Deux types cellulaires sont à l’origine des lymphocytes T

Les lymphocytes T, des cellules qui jouent un rôle central dans le fonctionnement du système immunitaire, proviennent de deux sortes de précurseurs. Cette découverte, réalisée par des chercheurs de l’Inserm, apportent une pierre majeure à la reconstitution de l’édifice lymphocytaire.

Deux vagues successives de précurseurs donnent naissance à l’ensemble des lymphocytes T retrouvés dans l’organisme adulte. La première fait déferler des cellules lymphoïdes dans le thymus au cours du développement très précoce. Elle est relayée par une seconde vague de cellules plus immatures, qui vont coloniser cet organe tout au long de la vie. Ces deux types de précurseurs se différencient en plusieurs sous-types de lymphocytes T aux propriétés différentes. Si l’on ne sait pas encore pourquoi ces deux vagues sont nécessaires, la découverte de ce phénomène permet de mieux comprendre l’hétérogénéité des sous-populations de lymphocytes présentes dans l’organisme, une hétérogénéité cruciale puisqu’elle contribue à l’efficacité du système immunitaire dans la défense contre les agents pathogènes, internes et externes. 

Des résultats fédérateurs

« Depuis plus de vingt ans, les chercheurs tergiversaient sur la nature des cellules souches qui donnent naissance aux lymphocytes T au cours du développement. Certains estimaient que ces derniers étaient issus de l’arrivée de cellules lymphoïdes dans le thymus, alors que d’autres pensaient qu’ils provenaient de cellules beaucoup plus pluripotentes. Dans les deux cas, la littérature présentait des arguments convaincants. Cette nouvelle étude met un terme à ce conflit d’opinion en donnant partiellement raison aux deux théories », explique Ana Cumano*, coauteur de ces nouveaux travaux. Son équipe vient en effet de montrer que les lymphocytes T proviennent en fait de l’arrivée successive de ces deux types de précurseurs dans le thymus. 

Ces travaux ont été conduits in vitro et in vivo chez la souris. Ils montrent qu’une première vague de cellules lymphoïdes donne naissance à des lymphocytes T dits « embryonnaires », jusqu’au 16e jour de gestation chez la souris. Cela correspond environ à un ou deux mois de grossesse chez l’Homme. Ces cellules murissent très vite mais sont peu diversifiées et prolifèrent mal. Elles colonisent préférentiellement l’épithélium de la peau. Au terme de cette période, une seconde vague de cellules souches hématopoïétiques arrive. Les lymphocytes T qui en résultent sont plus variés, prolifèrent facilement et sont davantage impliqués dans la défense globale de l’organisme.

Restaurer le système lymphocytaire

Outre la satisfaction de trancher sur une polémique scientifique en suspens depuis des années, la chercheuse estime que ces travaux sont fondamentaux pour reconstituer le système lymphocytaire complet. « Ces résultats montrent qu’il faut partir de ces deux types de précurseurs pour obtenir l’intégralité des lymphocytes T. C’est une donnée importante dans le cadre de la recherche contre l’immunodéficience innée, ou encore pour tenter de restaurer des populations lymphocytaires déficientes chez des personnes âgées ou malades », conclut-elle.

Note
*unité 668 Inserm/Institut Pasteur, équipe Développement du système lympho-hématopoïétique, Paris 

Source
C. Ramond et coll. Two waves of distinct hematopoietic progenitor cells colonize the fetal thymus. Nature Immunology, édition en ligne du 8 décembre 2013.